[Scène locale] Jessica Moss – Pools Of Light
La musicienne montréalaise Jessica Moss a lancé son premier véritable album solo, intitulé Pools Of Light, via l’étiquette Constellation Records en mai dernier. Membre permanente du groupe culte Thee Silver Mt. Zion Memorial Orchestra, elle a également participé à la fondation du projet de musique acoustique Black Ox Orkestar en plus de collaborer avec la formation de rock expérimental Big ‡ Brave à plusieurs reprises. Son projet solo, sur lequel elle travaille depuis environ deux ans de manière plus sérieuse, lui permet de composer d’une façon beaucoup plus intime et personnelle, ce qui fait ressortir un côté revendicateur et fascinant que l’on peut entendre tout au long de ce grandiose album.
Le premier morceau de l’album, Entire Populations, s’annonce comme un long périple compte tenu de sa segmentation en quatre parties distinctes. La paisible mélodie du violon nous saisit rapidement, il suffit de se laisser bercer par celle-ci pour disparaître dans un univers pour le moins imprévisible. La constante évolution de cette rythmique répétitive laisse place à une poignante augmentation de l’intensité. Une fois l’accalmie derrière nous, la lente entrée en scène du chant surprendra plusieurs auditeurs. Les paroles demeurent toutefois très simples, alors que Moss répète sans cesse le titre de la chanson, mais les différentes formes que prend ce chant font ressortir une vaste gamme d’émotions et créent une présence enveloppante qui transcende la réalité.
Cette voix omniprésente s’éteint graduellement et laisse place au retour du majestueux violon, la troisième partie pourrait aisément être la trame sonore d’un très grand film. Il est impossible de ne pas s’abandonner face à la délicatesse et la somptuosité de cette splendide composition. L’enchainement entre les quatre portions est impeccable, les transitions sont imperceptibles, la conclusion s’incruste tout en douceur et la pureté de son violon mène à une finale que nous n’attendions pas aussi hâtivement. Une pièce de cette qualité mériterait de durer à l’éternité.
Un changement de ton se fait aussitôt sentir, les chants majestueux s’entremêlent peu à peu à une mélodie des plus envoûtante. Le rendu est totalement hypnotisant, c’est l’un des moments les plus forts de Pools Of Light, cette technique de superposition des sonorités est absolument fascinante. La voix recouvre presque entièrement l’harmonie perceptible en arrière-plan, les sonorités sont riches, complètes et complexes, elles tracent un chemin que nous devons suivre sans questionnement. Cette mélodie a une identité nordique qui n’est pas sans rappeler la formidable musique de la formation islandaise Sigur Rós. Le tout se conclut merveilleusement bien avec une séquence où les vibrations sont à l’honneur, ce qui donne naissance à un contraste avec les sonorités précédemment entendues.
La pièce s’amorce avec une musique légèrement plus sombre que ce que l’on a entendu dans la première partie de Glaciers. Les froides harmonies se perpétuent alors que l’on entend une trame de fond qui pourrait s’apparenter à l’eau qui se heurte sur une banquise en affaissement. La lumière et l’obscurité sont toutes les deux perceptibles dans ce segment, mais ne semblent pas en dualité, elles s’accompagnent pour former une mélodie gracieuse d’une beauté à laquelle il est impossible de ne pas abdiquer. Moss réussit, à elle seule, à meubler l’espace sonore comme si plusieurs musiciens s’adonnaient à la création de cet impressionnant mur de son qui s’atténuera tranquillement pour mettre fin à ce récit auditif. La touchante finale est suivie par un mystérieux air d’harmonica et les pleurs d’un enfant, ce qui vient boucler l’album d’une manière tout à fait inattendue, un immense contraste avec l’ambiance proposée jusqu’ici par Glaciers II.
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Paru le 5 mai 2017 sur Constellation Records.
- Révision du texte par Geneviève.