[Scène française] Traître Câlin – XIII EX-VOTOS
XIII EX-VOTOS est le genre d’album que nous n’attendions pas, que nous n’attendions plus. Traître Câlin est un projet que nous n’avions jamais imaginé, qui va où bon lui plaît, que ça nous convienne ou non. Et soyez averti·e·s, c’est de la musique qui peut très bien déplaire aux oreilles chastes par son aspect disgracieux, qui parvient aisément à déboulonner les esprits fragiles et confinés. Tel un parasite qui embrouille les ondes radio, le duo composé de Jbaâl et nAda effrite les tympans en nous bastonnant ses paroles scabreuses en pleine gueule. Dans une formule que l’on pourrait approximativement qualifier de « noise rap », ils apposent leurs mots sur des textures électroniques parfois affûtées, mais souvent dégoulinantes de sueur et de sang. Les voix se chevauchent impétueusement et les synthétiseurs sont abrasifs, cette synergie provoque un état altéré de conscience aux auditeurs qui auront envie d’y plonger tête première. Les sons qui émanent de cet album enduit de cendres sont tout aussi euphorisants que choquants, on se perd avec grand intérêt dans cette désinvolture stylistique.
Deux ans après la parution d’un premier EP, Par Traîtrise, qui laissait présager le pire, Traître Câlin revient avec une impressionnante hargne. La passion noire qui habite le duo est contagieuse, il est impossible de demeurer insensible face à un hymne décadent du calibre de NOIR DE NÉANT, pierre angulaire de XIII EX-VOTOS. Le barda belliqueux que représente ce premier opus est toutefois propulsé par des morceaux plus fougueux comme ARME AUTOMATE, CIELS SÉNILES et FEU FOLLE FOI qui nous procurent pratiquement autant de plaisir que de douleur. Il ne faut surtout pas être effrayé·e de le faire jouer à haut volume pour en décupler les sensations, mais faites gaffe aux maux de crâne qui pourraient s’ensuivre. C’est grâce à leur excentricité que les deux acolytes se démarquent du lot de projets rap qui aiment faire du tapage, prenez des titres comme LIBRE ÉBRIÉTÉ et DORICA CASTRA par exemple, où les prouesses vocales sont totalement délirantes et surtout dépourvues de toutes formes de comparaisons. Malgré les quelques mises en garde de cette chronique, sachez que Traître Câlin atteint néanmoins un bel équilibre entre la folie et le fonctionnel. Il suffit simplement d’accepter que le groupe nous dérobera un brin de sanité à chaque fois que nous le ferons résonner.
→ À écouter si vous aimez : Manikineter, Moodie Black & Wolf City.
→ Morceau favori : ARME AUTOMATE
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Paru le 13 octobre 2020 sur Atypeek Music & Solium Records.
- Révision du texte par Sandra.