[Scène locale] Jerico – Walls
Jusqu’à tout récemment, la musique de Jerico m’était totalement inconnue même si, certes, ce visage familier de la scène montréalaise avait croisé mon regard à de nombreuses reprises lors de soirées. Lorsque j’ai pris connaissance qu’il était derrière la nouvelle parution de l’étiquette New, c’est avec un intérêt immédiat que je me suis lancé à l’écoute de Walls.
1. Walls
Une trentaine de secondes se sont à peine écoulées que ce vent de fraicheur me décoiffe déjà. L’infusion de ses origines haïtiennes aux percussions électroniques est aussi délectable que surprenante. N’ayant pratiquement aucune référence dans le créneau musical de cette région, ce qui est malheureux, j’en conviens, je constate tout simplement qu’une chaleur inhabituelle colle aux rythmiques saccadées du jeune producteur. Le résultat de cet improbable amalgame d’éléments me rappelle certains morceaux des albums de Kode9 & The Spaceape, deux artistes pour lesquels j’ai un immense respect. L’omniprésence du chant sur cette pièce d’introduction constitue définitivement l’un des points forts de Walls, un élément qu’il n’avait jamais vraiment exploité au préalable dans sa musique. Il est très agréable de voir Jerico à ce point à l’aise et confiant aussi tôt dans sa carrière. Une entrée en matière intrigante qui laisse présager de magnifiques choses pour la suite de ce EP.
2. Voyé Monté
La composition la plus imposante de l’album nous offre une invitée de renom, la très flamboyante Chris Vargas du duo Pelada. Une collaboration logique puisque la musicienne est impliquée dans la maison de disques qui produit cette nouvelle sortie. Son apport est évidemment moins éclatant et offensif que dans son principal projet, mais ses lancinantes fresques vocales se marient merveilleusement bien avec la construction rythmique de Voyé Monté. La lente progression du second titre parvient à nous démontrer une autre facette du talent de Jerico. J’aimerais bien le voir s’aventurer davantage dans des créations plus spacieuses comme celle-ci pour ses prochaines parutions. Je n’ai aucun doute qu’il arriverait à nous charmer aisément même en proposant de plus longues pièces comme il l’a si bien fait dans le cas présent.
3. Pafwa
La courte conclusion nous prend par surprise avec un chant vif qui surgit très spontanément en début de morceau. La phrase se traduisant comme ceci «Parfois, je me demande si je devrais appeler mon père pour qu’il corrige les textes que j’écris en créole» dépeint d’une manière très humble la volonté du musicien de parfaire son savoir envers ses racines. Le moins qu’on puisse dire est qu’il réussit magnifiquement bien à intégrer sa filiation au travers des trois compositions; c’est un réel exploit de cohérence et de pertinence. Malgré sa courte durée, Pafwa arrive tout de même à nous faire bouger admirablement avec ses vivifiantes percussions. Ce EP nous donne l’eau à la bouche, en espérant voir rapidement du nouveau matériel de sa part. Jerico s’inscrit définitivement comme l’un des artistes les plus prometteurs de la bouillonnante scène montréalaise, ne tardez pas à le découvrir!
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Paru le 6 avril 2018 sur New.
- Révision du texte par Geneviève.