MEFD : 2016 – 2021
Plusieurs d’entre vous l’auront sans doute vu venir, ou encore ressenti, mais la fin est bel et bien arrivée pour MEFD. Après cinq belles années à farfouiller la scène montréalaise et ses environs, l’équipe a finalement décidé de mettre un terme définitif à ce beau projet que nous chérirons encore longtemps après sa mort. Afin de conclure cette épopée d’une agréable manière, nous avons laissé le champ libre à quelques rédacteur·trice·s afin de s’exprimer sur leur appréciation et leurs souvenirs reliés à cette plateforme musicale atypique. Voici donc ce qui est vraisemblablement notre article final, en vous remerciant de tout cœur de nous avoir lu·e·s, soutenu·e·s, encouragé·e·s et aidé·e·s au fils du temps. L’esprit et la passion qui habitent le site se déferleront sur plusieurs autres projets subséquents, alors restez à l’affût au cours des prochains mois!
ADRIEN
Mon expérience au sein de MEFD n’aura été que de courte durée. Mais j’y ai pris un immense plaisir. Connaissant Louis et William depuis très longtemps je les savais mélomanes et passionnés. Quand ils ont posté une demande pour élargir le bassin de chroniqueurs, j’ai sauté sur l’occasion, sachant que je pourrais parler de groupes sombres et obscurs. Je savais que j’allais pouvoir écrire encore plus librement que sur des sites conventionnels axés sur les genres punk, metal et hardcore. Cela m’a donné l’occasion de taper le bout de gras avec l’un de mes groupes préférés, Rorcal, ou encore de faire une interview passionnante avec Bruit≤. De mon point de vue, ces deux formations auront marqué l’année 2021 au fer rouge. Pour cette opportunité, je ne peux qu’être reconnaissant envers eux.
MEFD m’a permis de repousser mes frontières musicales avec des artistes comme Earthflesh et plus récemment avec la découverte de Kabbel. En parlant davantage avec William de cet artiste, il m’a indiqué qu’il faisait partie de Time To Burn dont l’album Is.land m’avait profondément marqué en 2007. Mais, s’il y a un album à recommander dont MEFD a parlé, c’est bien C I N D E R, le deuxième album de C H R I S T, qui représente un morceau colossal de notre scène montréalaise, et dont le dernier titre T O W E R est un véritable monument.
Au travers de la passion de ses instigateurs, MEDF aura été un exemple de webzine qui démontre que la musique se vit autant qu’elle s’écoute, et que son importance est telle qu’elle mérite bien plus qu’être un support sur des listes Spotify ou autre. Merci pour tout.
BEN
C’est un simple e-mail qui est à l’origine de ma rencontre avec Mes enceintes font défaut. Je cherchais à faire parler d’Early Warning Signs of the Apocalypse, l’album que je sortais à l’époque. Je dois reconnaître ici que je n’étais pas un lecteur régulier de Mes enceintes font défaut. Mais un rapide tour sur le site m’avait immédiatement convaincu: mise en page sobre, élégante, textes clairs mais empreints d’une ambition littéraire certaine, rubriques à l’identité affirmée. Tout dans ce webzine exsudait la qualité.
Alors au moment où je recevais la réponse de William qui m’annonçait que Louis allait chroniquer Early Warning Signs of the Apocalypse, je ne pu cacher mon excitation. Les jours d’attente entre cet instant et la parution de l’article, je peux le révéler maintenant, furent longs. En découvrant enfin celui-ci, le sentiment de fierté que j’ai ressenti était indescriptible. L’article était superbe, élogieux, travaillé et les termes judicieusement choisi. Qu’un jeune amateur de musique à l’autre bout du monde prenne de son temps pour écrire sur ma musique était inestimable à mes yeux. J’ai lu cet article à bien des personnes et l’ai partagé plus que de raison.
Quelques mois plus tard, lorsque William se chargeait de la chronique d’Archives of Mankind et l’excitation était la même. Au risque de passer pour quelqu’un de narcissique (ce que je suis quand même un peu), j’ai relu ces textes pour mon propre plaisir de nombreuses fois.
Inutile de dire qu’entre-temps, j’étais devenu un lecteur assidu de Mes enceintes font défaut.
Louis, William, vos textes m’ont apporté de la fierté, bien sûr, mais aussi de la joie, une joie intense et profonde. Ils furent également une source inépuisable de confiance et de motivation. Ils représentaient évidemment une manne inépuisable de découvertes. Car, ne nous y trompons pas, l’arrêt de MEFD est une perte inestimable pour l’underground. C’était un refuge pour les outsiders, les créateurs de tous bords, les amateurs de sensations fortes et d’expérimentations ardues. C’est dans vos colonnes que j’ai découvert les méfaits de Traître Câlin, Neo Geodesia, Hekàtē, Spartan Jet-Plex, du label Chez Kito Kat, de Boar God et de tant d’autres. Qui d’autre que vous était capable de chroniquer un album aussi frappadingue que celui de R41ÑBOW TR4$H? Artistes et mélomanes perdent beaucoup. (Très) rares sont ceux capables d’assurer la relève (et ce ne sera pas vers la presse écrite qu’il faudra se tourner).
J’ai eu la chance et l’honneur de faire partie de cette aventure quelques mois durant. Ce fut un challenge passionnant et exaltant. J’ai espéré rendre (un peu) de ce que Louis et William m’avaient donné. Et je peux témoigner du travail que cela représente!
Au moment où Mes enceintes font défaut s’arrête, je ne peux que remercier chaque contributeur pour chacune de ces merveilleuses découvertes et, surtout, William et Louis pour avoir mené avec passion leur barque dans les flots déchaînés des musiques expérimentales. Sachez que nous avons hâte de voir ce que vous nous réservez à l’avenir.
JB
La diversité et la liberté, ce sont les mots qui me viennent à l’esprit pour décrire ce projet. Écrire des articles sur de la musique heavy metal en allant jusqu’au jazz, bref tout est possible chez MEFD. Pendant trois ans, avec plus ou moins de régularité, j’ai plus particulièrement décrit des albums techno et house dont ma première parution fut sur l’ouvrage de Blawan intitulé Wet Will Always Dry. L’écriture qui m’aura le plus marqué a été l’EP VOOO des artistes suédois SHXCXCHCXSH, car c’était le tout début de la crise sanitaire et ces quatre pièces sonores m’ont permis de me déconnecter de cette situation.
Faites votre propre culture musicale, cela pourra vous éloigner de certaines personnes, mais vous en trouverez d’autres connaissances qui partageront vos goûts musicaux.
LAURA
Malgré une longue absence dans l’écriture de recommandations pour le site, il est certain que MEFD aura eu un impact particulier dans ma vie.
Il y a quatre ans de cela, j’ai découvert par l’intermédiaire de la page Facebook de mon producteur d’ambient favoris (bvdub), ce blog bien intrigant qui m’aura permis jusqu’à ce jour de découvrir et apprécier la musique en toute simplicité. Je me souviens avoir été charmé, voir percuté par la simplicité et la sincérité que dégageait chaque texte écrit par les collaborateurs·trices. Je voyais en MEFD une place d’expression où liberté et générosité étaient de mise.
La partie sociale et échange était importante pour moi; c’est quelques mois après mon intégration que je décide de prendre mes billets d’avion pour rencontrer William et Louis qui, aujourd’hui, sont devenus des amis.
Pour conclure, je tenais à repartager à nouveau cet album qui m’aura en partie fait aimer le post-punk!
LOUIS
Difficile de ne choisir qu’un seul album pour me remémorer les quelque cinq dernières années dans la folle aventure que fut celle de MEFD. Il y a ma toute première chronique, aussi nulle soit-elle, à propos de l’excellent EP éponyme des amis de Maggot Breeder, il y a des albums qui m’auront aidé à passer au travers des périodes difficiles comme le si saisissant Recherche Spatiale de Laura Krieg, et d’autres qui m’auront fait vivre des émotions fortes en concert comme le brutal Facades de Limp Wrist…
Mais au travers cette infinie découverte d’artistes, de labels, de niches ou de styles musicaux, il y a tous ces moments de communion musicale, d’extase, ces discussions enlevantes autour d’une pinte à la Casa, entre deux sets sur les trottoirs du boulevard Saint-Laurent… tant de rencontres impromptues qui devinrent des amitiés, fortes, uniques, passionnées. Alors quel album serait mieux placé que le désormais mythique Play Queue des amis de Chabanel pour clore ce périple? Une expérience challengeante en premier lieu qui au final aura résulté en la rencontre de deux personnes formidables, à une panoplie de moments inimaginables et en d’innombrables amitiés. Même si ce chapitre se termine, jamais personne ne pourra effacer cette multitude de souvenirs.
Merci à tout le monde qui nous aura supporté·e·s au long de cette sinueuse route, merci de nous avoir lu avec attention, de nous avoir offert votre confiance pour vous fournir mille et une débauches musicales, merci à chaque artiste, label, collectif, média, agence de presse, association qui aura pris le temps de nous écrire pour nous partager votre travail, merci William de m’avoir offert cette opportunité qui aura au final changé ma vie, pour le meilleur. Sans votre soutien, le projet ne se serait pas rendu aussi loin. Merci du fond du coeur et on se revoit très bientôt!
MARC
Ça faisait un moment déjà que j’avais Mes enceintes font défaut dans mon feed quand j’ai vu passer en 2018 la playlist de Fleisch Records, compilée par le toujours excellent Benjamin. Des Montréalais qui carburaient à l’EBM et faisaient la promotion de Kontravoid et Schwefelgelb? Il fallait que je m’immisce.
Évidemment, MEFD, c’était une source de découverte inouïe et un amour inconditionnel pour la scène locale — une denrée précieuse pour un genre souvent en marge —, mais pour moi, c’était aussi l’occasion de faire mes devoirs. Si je voulais parler de Bunker sérieusement, par exemple, il fallait maintenant que j’épluche les catalogues de Creme Organization, Electronic Emergencies et L.I.E.S. comme il se doit (j’aurai finalement jamais passé au travers de celui des géants Bunker Records).
Puis, au fil des rencontres et des collaborations, MEFD c’est surtout devenu des humains extraordinaires. Des gens animés d’une passion démesurée et dotés d’une culture musicale sans limites, oui, mais surtout des gens curieux et ouverts à tout ce qui les entoure et qu’on espère tous, au final, compter parmi ses amis. Merci aux Paulhus d’avoir mené ce projet à bout de bras pendant cinq ans. Bonne chance pour les projets à venir. On se revoit sur le dancefloor!
RÉMY
Telles les pulsions électroniques serpentines d’une valse techno, on aimerait que la rythmique ne faiblisse jamais, que la transe ne se tarisse jamais, que la performance ne cesse jamais… C’est ce qui est magnifique avec la mémoire, tout peut y perdurer. Un peu comme mon souvenir de ce premier MUTEK avec William, une nocturne infinie avec les monumentales basses d’Emptyset et les enivrantes rythmiques de Jon Hopkins. Je suis honoré d’avoir été de ce beau projet dans ces premiers temps. Bravo aux deux frérots qui ont mixé avec brio tout ce contenu. Longue vie à MEFD, qui résonnera longtemps comme une folle aventure!
WILLIAM
Cette aventure rocambolesque aura duré presque cinq ans. Cinq belles années à faire les fous sur des parterres jonchés de bières éclaboussées et de sueur. Au travers du plaisir que nous avons eu dans la réalité, il y aura aussi eu les 800 articles que nous avons rédigés collectivement à propos de projets parfois connus, mais très souvent obscurs à souhait. Avec MEFD tout était permis et nous avons élargi nos horizons ensemble, sortant très souvent de notre zone de confort, spécialement pour un non-musicien comme moi qui devait écrire sur des chefs-d’œuvre que je pouvais décortiquer uniquement avec ma tête et mon cœur.
Des dizaines d’amitiés en ont évidemment découlé. Pour la plupart avec des gens d’ici, mais aussi plusieurs autres dispersés partout à travers le globe. C’est d’ailleurs ce qui permettra à MEFD de demeurer vivant malgré son arrêt définitif, je parle bien sûr des nombreuses relations que nous aurons bâties au travers d’un média imparfait, mais sincère. La disparition graduelle de ce genre de lieux marginaux du web m’attriste beaucoup et j’espère que des gens prendront le temps de créer des espaces personnels qui permettent de réelles connexions entre artistes et mélomanes. Et puisque je dois choisir la dernière sélection musicale de l’histoire de MEFD, j’y vais avec l’une de ces belles rencontres humaines que j’ai eu la chance de faire durant cette période marquante de ma vie. Celle du projet Earthen Sea, qui aura été le sujet de notre tout premier article, mais que nous avons aussi pu accueillir lors de notre concert de deuxième anniversaire. Son album An Act Of Love, résume entièrement ce que le site représentait pour moi; que de l’amour pour des humains merveilleux et de la bonne musique à s’y perdre éternellement.
Merci encore une fois à tous ceux et celles qui nous ont suivis assidûment (ou non), aux artistes formidables et surtout à tout le monde qui a collaboré de près ou de loin avec nous pour la rédaction et la mise en place des divers projets. On se revoit très bientôt devant la scène d’une salle enfumée!