[Scène française] YOKE – Immorale Emotion
Déstabilisé est le premier mot qui survole mon esprit après l’écoute de la tonne de briques que constitue cet album de YOKE. Le producteur, vivant à Chambéry dans les Alpes françaises, empile les couches de noise pour construire un rouleau compresseur qui ne s’arrêtera devant rien, emportant tout sur son passage. Immorale Emotion, sa toute première parution, est dotée d’une richesse sonore colossale. À travers cette dévastation, il façonne de véritables paysages à partir desquels il est facile de s’évader à l’intérieur de nos pensées pour se créer notre propre histoire. Ce récit de quatre chapitres peut prendre différentes formes, mais le thème principal gravitera inévitablement autour de la destruction. Un anéantissement physique et bien tangible, mais également un écrasement psychologique et ancré au plus profond de soi-même.
Dès les premiers échos de Parrure Organique, l’angoisse me saisit. La mélodie, très aérienne, me projette en quelques secondes à l’épicentre d’une ville. Je me réveille à la suite d’un lourd choc à la tête, désorienté et complètement déboussolé. Je retrouve lentement mes repères, mais la constante augmentation d’intensité me déstabilise à nouveau. Mon monde vacille et je m’apprête à basculer…
L’enchaînement vers Le Chant Des Possibles se fait dans le calme. Les sonorités sont beaucoup plus sourdes, les vibrations sont reines, ce qui provoque une sensation étrange et même perturbante dans mon casque d’écoute. Je me projette sur une plage dans la pénombre et je sais qu’un cataclysme se dessine. Les grondements se font persistants, mais je reste sur place, impuissant face à la tempête qui s’amène. Je ne peux que me poser en contemplation devant ce carnage inévitable.
Le ton change drastiquement alors que le début de Contact Animal est abrupt. Nous avons droit à quelques secondes de harsh noise avant qu’un martèlement impitoyable vienne nous piétiner. La tension monte, poussant même vers la rage et la bestialité. L’image qui apparaît dans ma tête est celle d’une usine désaffectée. Les gens se sont rassemblés pour contempler de la violence, pour voir du sang. Les percussions répétitives et efficaces surchargent l’atmosphère d’une intensité qui devient stressante et qui a de quoi rendre fou.
Viendra finalement Scandale Pur qui poursuivra dans la même veine que le morceau précédent. Le rythme s’accélère rendant la pression presque intenable. La panique me gagne avec les bruits de plus en plus forts et de plus en plus rapides. Face à tant de véhémence et de chaos, je dois m’avouer vaincu, je suis épuisé… Le pari de YOKE est certainement réussi!
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Paru le 23 février 2019.
- Révision du texte par Sandra.