[Festival] Red Bull Music – Marie Davidson: Save The Last Dance For Me
L’une des soirées les plus attendues de cette fin d’été était sans contredit le fameux dernier concert «club» de la reine montréalaise de l’électronique Marie Davidson. Pour l’occasion, le Red Bull Music Festival lui avait donné l’opportunité de s’entourer d’artistes de son choix afin de dire adieux convenablement à son public. Elle en a alors profité pour inviter plusieurs ami·e·s d’ici et d’ailleurs pour monter un événement haut en couleur, mais surtout en décibels.
À la surprise générale, un changement de salle de dernière minute nous était annoncé la veille du spectacle, passant du Studio Notre-Dame vers la SAT. Ceci était annonciateur d’une soirée plus confortable et détendue que le rave initialement prévu jusqu’à 6h du matin. Nous avons alors pu profiter de la sublime terrasse du nouveau lieu afin de baigner dans une sélection musicale de l’italien Marco Passarani et de ses amis. Disons simplement que le DJ nous a permis de prendre un verre sous ses choix musicaux plutôt que de nous offrir une réelle performance. Rarement présent derrière les platines, l’ambiance était plutôt décontractée et à la fête, ce qui est tout à fait logique pour célébrer cette dernière performance de Marie.
© Photo: Maria Jose Govea
La portion de la soirée qui se déroulait dans le dôme nous réservait deux performances drôlement relevées de Feu St-Antoine et Kara-Lis Coverdale, toutes deux accompagnées par les visuels du collectif montréalais susy.technology. En premier lieu, nous faisions face à la performance de Pierre Guerineau, mari de la vedette de la soirée, qui se devait logiquement de faire partie de la programmation pour cette dernière danse. Après avoir vu ce projet à trois reprises depuis le début de l’année, nous étions curieux d’assister à l’une de ses performances dans un environnement totalement différent et surtout, accompagné d’un support visuel grandiose. Ce fut loin d’être décevant!
Le public qui était installé confortablement sur des coussins ou aggloméré près de la porte a eu droit à une prestation saisissante et sentie. Le set était similaire musicalement à ce que nous avions vu dans les derniers mois, mais la sonorisation de la salle ajoutait de la puissance et rendait encore plus justice à la musique de Pierre. Passages harmoniques au clavier, segments électroniques soutenus, le tout agrémenté d’une bonne dose d’expérimentations vocales venait montrer l’éventail des talents du producteur. Il s’agissait déjà d’une réussite au niveau audio, mais les magnifiques visuels rendaient l’expérience encore plus unique. Une identité fidèle à susy.technology qui s’agençait à merveille avec la musique.
© Photo: Maria Jose Govea – Feu St-Antoine
Ensuite, qui de mieux que la Canadienne Kara-Lis Coverdale pour venir ajouter sa touche féerique à une soirée qui était déjà bien enivrante? Nous sommes très choyé·e·s de la voir se produire à de nombreuses reprises à Montréal, mais nous ne pouvions pas demander mieux que sa présence sur une affiche aussi béton pour clore un chapitre très important de la carrière de Marie Davidson. C’est dans les zones qu’on lui connaît si bien que Kara-Lis naviguait afin d’hypnotiser son auditoire. Des mélodies ambiantes empreintes de douceur et de délicatesse ainsi que des envolées aériennes étaient au rendez-vous pour nous propulser dans un gracieux tourbillon onirique. De quoi nous rappeler la performance qu’elle nous avait livré dans ce même dôme au festival MUTEK il y a deux ans. Encore une fois, les visuels étaient grandioses, mais il nous était difficile de ne pas fermer les yeux devant une musique aussi délectable.
© Photo: Maria Jose Govea – Kara-Lis Coverdale
Les festivités débutaient vers 22h dans la grande salle de la SAT. À peine une dizaine de personnes se trémoussaient sur le parterre lors des premiers sons de la Britannique Afrodeutsche. L’artiste ne passait pas par quatre chemins pour annoncer les couleurs de son set vivifiant. La cadence était très élevée malgré le public restreint et l’objectif était évident, nous délier les jambes pour ce qui allait suivre. Pendant près de deux heures, la talentueuse productrice réchauffait la salle avec un alliage de musique acid et techno ponctuée de percussions entrainantes et déstabilisantes. Les dernières minutes de sa prestation lui offraient enfin un parterre bien garni et frénétique qui semblait unanime devant sa sublime performance. À revoir absolument!
© Photo: Maria Jose Govea – Afrodeutsche
Le duo montréalais Solitary Dancer, que vous connaissez peut-être pour la collaboration avec Marie Davidson sur la pièce Emails 2 Myself, poursuivait la soirée. Devant un public plus ou moins attentif, le set s’entamait avec une mystérieuse lecture de quelques pages d’un livre. Légèrement septique aux premiers abords, la foule se laissait conquérir lentement devant la fulgurante progression que les deux artistes nous offraient. C’est lorsque le sublime titre Transmitting To Heaven a finalement retenti entre les piliers stoïques de la salle que l’ambiance atteignait finalement une zone agréable. S’en suivait une hausse de la cadence et de la puissance sonore qui donnaient finalement des ailes à Solitary Dancer. Ce fut une magnifique heure de musique électronique planante qui aurait sans doute pu bénéficier d’un concept visuel plus étoffé, tel que le duo nous a habitués par le passé. Les spectateur·trice·s qui connaissaient déjà ce projet semblaient apprécier le tout, mais les non-initié·e·s ont semblé rester sur leur appétit. Je conseille fortement à cette deuxième catégorie de donner une seconde chance au duo dans le futur.
© Photo: Maria Jose Govea – Solitary Dancer
Le clou du spectacle arrivait enfin sur scène, la resplendissante Marie Davidson faisait son entrée pour nous faire suer pendant une heure des plus intense. C’est avec une version frénétique de The Psychologist qu’elle entamait cette dernière valse. Elle semblait être là pour se faire plaisir avant toute chose grâce à une sélection musicale plus percutante qu’à l’habitude et beaucoup moins axée sur le chant. Bien sûr, nous avons eu droit à quelques classiques comme Naive To The Bone, Work It et So Right où elle pouvait se permettre quelques monologues envers le public. Le reste de la performance avait comme principale mission de nous faire danser comme elle ne l’a pratiquement jamais fait auparavant. Cette formule pouvait paraitre quelque peu dénaturée pour ceux et celles qui aiment la voir prendre la parole fréquemment, mais c’était hautement jouissif peu les autres qui avaient tout simplement envie de faire la fête en sa compagnie.
En superbe forme, Marie était épaulée par des projections audacieuses qui captaient ses mouvements et les retransmettaient en direct au public. Ce n’était pas sans rappeler le superbe concept que Sinjin Hawke & Zora Jones nous avaient servi il y a quelques semaines aux 7 Doigts de la Main. Cette danse finale s’est évidemment conclue sous la pièce d’anthologie Adieu au Dancefloor qui a malheureusement failli être coupée par les techniciens de scène. Heureusement, Maman a eu le dernier mot et a même promis un set complet de Depth Charge à la foule malgré l’heure qui avançait à grands pas. Marie Davidson aurait difficilement pu être plus efficace avec son ultime performance, maintenant nous avons très hâte de voir les projets qui l’attendent dans les prochaines années. Merci pour tous les beaux moments Marie!
© Photo: Maria Jose Govea – Marie Davidson
Quoi de mieux que de conclure l’événement avec deux légendes vivantes de la techno de Detroit? Le duo Depth Charge, composé de Mark Flash et Mad Mike Banks, s’apprêtait à nous faire bouger comme eux seuls savent le faire. Le problème fut l’interminable transition entre la performance de Marie et celle-ci. Plus de vingt minutes se sont écoulées et cela a fait fuir la moitié du public qui, soyons honnêtes, était présent pour elle avant toute chose. L’idée de la faire clôturer le spectacle aurait sans doute été plus judicieuse et aurait permis une meilleure ambiance pour ce légendaire projet.
Sans éclat et avec une certaine froideur, le duo tentait tout de même de faire de son mieux malgré les circonstances. La sonorité déficiente de la SAT ne rendait absolument pas justice à Depth Charge et il fallait constamment jongler entre les poteaux pour obtenir un bon rendu. Le labyrinthe techno offert par Mark et Mike aura duré à peine une heure vu le couvre-feu légal de la salle, mais il aura toutefois su convaincre les fervent·e·s de ce projet qui étaient facilement identifiables dans la foule. Dommage d’avoir expérimenté un projet de cette envergure dans des conditions aussi désavantageuses. Une certaine déception planait dans les regards à la sortie de la salle de spectacle, ce qui résumait une soirée parsemée de hauts et de bas, mais qui aura donné lieu à une performance magique de notre chère Marie Davidson.
© Photo: Karel Chladek – Depth Charge
- Texte réalisé en collaboration avec Louis.