[Scène locale] Jaclyn Kendall – Pressure Pulses
J’ai eu le privilège d’entendre Jaclyn Kendall pour la première fois cet été, dans le cadre du passage de la formation canadienne Orphx à Montréal. Elle se produisait en duo, sous le pseudonyme TIN en compagnie de Josh Korody. J’ai été agréablement surpris par la qualité offerte en entrée de soirée alors que les rythmiques, dansantes à souhait, n’ont pris que quelques secondes avant de m’accrocher. J’ai par la suite assisté à deux de ses prestations solos et je dois admettre qu’il m’est impossible de demeurer insensible à l’écoute de la riche musique que la Montréalaise d’adoption nous propose.
Pressure Pulses, le EP qu’elle nous a présenté en octobre dernier sur l’étiquette torontoise Summer Isle, est fidèle à ce que j’avais expérimenté. Elle nous sert des sonorités expérimentales et techno qui choquent et qui ne vous laisseront pas indifférent·e·s. Ne ratez pas sa performance à la Sala Rossa le 31 décembre dans le cadre du concert de fin d’année du Suoni Per Il Popolo, alors qu’elle ouvrira une soirée qui s’annonce extraordinaire avec Lowebrau, Boy Harsher, Essaie Pas et Schwefelgelb. L’action sera également présente à la Sotterenea avec Jargoness, Icky Magdala, shakti-in-flux, softcoresoft et anabasine. Nous vous conseillons d’arriver tôt pour ne rien manquer de la prestation de Jaclyn.
L’ouverture de ce périple se fait en douceur. On sent que la productrice utilise le temps nécessaire pour mettre en place une ambiance qui se veut glauque et inquiétante. Alors que le tempo augmente sereinement, une certaine angoisse naît et se témoigne par un sentiment d’inconfort. Nous ne sommes pas en contrôle. La tension s’accentue lorsque des sonorités constantes de basses se font entendre et que l’intensité grimpe. Des percussions viennent s’ajouter aux grésillements et aux basses soutenues. L’atmosphère est oppressante, le rythme est rapide et sans relâche tel un métronome. Malgré la nervosité, l’hystérie et la sensation de désagrément que ce martèlement m’inflige, il m’est impossible de ne pas abdiquer afin de laisser cette aura, des plus mystérieuses, m’entourer et me porter plus loin. L’imparfaite mélodie agit comme un aimant et crée une dépendance qui m’enferme dans cet univers disjoncté et énigmatique.
Le second morceau débute avec plus de vigueur que le précédent. De longues basses s’enchaînent et disparaissent pour laisser place à un rythme impétueux et énergique. Si votre corps était demeuré immobile durant Light Taps Heard Through Air, il en sera différent pour les prochaines minutes alors que vous sentirez votre cœur battre comme jamais il ne l’a fait auparavant. Le tempo augmente sans cesse et la mélodie frappe avec l’agressivité d’un tsunami. Les particules sonores s’ajoutent les unes aux autres avec énormément d’habileté et de précision. Comme un camion, la musique de Kendall vous heurte de plein fouet, mais sa puissance agit de pair avec sa dextérité pour créer un remarquable et complexe mur de sons. La combinaison de ces éléments est rafraîchissante et ô combien intéressante. Les harmonies s’atténuent peu à peu pour se terminer à notre plus grand désarroi. Quelques minutes sont nécessaires afin de reprendre son souffle en raison des innombrables constituantes à assimiler lors de l’écoute. Je vous garantis que vous souhaiterez réentendre ce morceau à plusieurs reprises, car l’ampleur du travail paraît plus transcendante à chacune des écoutes.
Acid Test s’élève dans les hautes sphères de la techno industrielle alors que bien peu de musicien·ne·s peuvent marier déchaînement, intensité et justesse de cette manière. Il ne faut pas chercher à comprendre ce qu’on nous envoie, mais bien s’abandonner à la frénésie et à la véhémence que l’on nous propose. Jaclyn Kendall parvient à trouver un équilibre irréprochable qui uni des influences industrielles, noise et techno tout en demeurant dans l’imperfection que peut représenter une musique aussi déchaînée. Bien peu de morceaux m’ont ébranlé comme celui-ci en 2017.
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Paru le 15 octobre 2017 sur Summer Isle.
- Révision du texte par Geneviève.