[Scène locale] Mathieu Lamontagne – Obsolescence Programmée
C’est par une journée froide, sombre et morne que je m’attaque finalement à la plus récente parution de Mathieu Lamontagne. Une journée où le temps file très lentement, où l’air semble porter une certaine lourdeur. Cette pesanteur me semble tout aussi dérangeante que le thème de l’album, la tristement fameuse obsolescence programmée.
Comment le musicien québécois arrive-t-il à traduire en sons un sujet aussi révoltant? En rendant hommage aux défunts objets, du moins, c’est la perception que j’ai eu à l’écoute des six compositions. Le sentiment de ralentissement et le calme qui émanent de sa musique offrent une dualité absolue avec le concept dénoncé par celui-ci. Même si Obsolescence programmée est la trame sonore d’une mécanique humaine des plus choquantes, elle ne cherche certainement pas à perturber davantage, mais plutôt à faire réfléchir. Certes, Mathieu arrive à faire émaner une certaine beauté de cette forme d’anéantissement moral et écologique.
L’ensemble des sonorités du disque m’évoque le son du vent qui sifflote à travers les appareils brisés d’un dépotoir. À mes yeux, cette musique agit comme un constat d’échec, tel un regard pessimiste sur nos actions quotidiennes plutôt que d’offrir une piste de solution ou une prise de conscience. L’ambiance morose et sans espoir est particulièrement palpable sur les titres À l’heure ou encore Il est lourd. Malgré leur beauté et leur intemporalité, ces morceaux viennent par-dessus tout hanter notre esprit et nos songes. C’est à la fois sublime et maussade, comme si nous étions submergé·e·s par toute cette masse de choses que nous reléguons aux oubliettes. Ce nouvel opus représente pour moi la traduction d’une impuissance volontaire, de l’échec humain, de l’impact absurde que nous avons sur la planète, mais surtout, que nous sommes tou·te·s responsables en répétant certaines actions jour après jour. Préparez-vous pour un voyage ambiant et intimiste d’une grande émotivité, mais qui reflète très peu de luminosité.
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Paru le 21 septembre 2018 sur Polar Seas Recordings.
- Révision du texte par Sandra.