[Entrevue] Ora Cogan
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Si vous lisez le site depuis quelques années, le nom d’Ora Cogan vous est probablement déjà familier alors que nous avons couvert son album Crickets, paru en 2017. Si vous ne connaissez toujours pas la talentueuse musicienne de folk expérimental originaire de la Colombie-Britannique, c’est maintenant le temps de découvrir son travail incroyable alors qu’elle laissera paraître, le 13 juillet prochain, son nouvel album Bells In The Ruins, huitième long jeu à sa collection. Paysages sonores enchanteurs, mélodies remplies de rêverie et splendide chant aérien sont de nouveau au rendez-vous, et cela, à notre plus grand bonheur. À l’occasion de ce lancement, nous avons posé quelques questions à Ora Cogan pour en apprendre davantage sur son parcours et sur ce disque grandiose.
© Photo: Zoe Alma
Bells In The Ruins sera ton huitième album depuis 2007. Je me questionnais à savoir à quoi ressemblait ton processus de création et d’où provient l’idée principale qui t’inspire à la composition d’un album?
Il y a quelques chansons très tendres sur cet album… Il n’y avait pas de concept réfléchi. C’est vraiment un album emo. J’écrivais sur l’amour et les humains et j’avais de la difficulté avec ma gestion de l’amour et des humains et.. je luttais. Je pense que beaucoup de morceaux intéressants ont commencé à se former pendant ma tournée dans le Nord. Je suis allée avec Reggie Bast à la maison du père de mon amie Marin Patenaude à Horsefly pour écrire pendant un moment.. C’est un endroit très rêveur. La famille de Marin est très musicale et nous prenions des pauses pour faire des jams dans la cuisine et pour nous amuser avec les chiens. Sortir dans des endroits comme celui-là met toujours de l’ordre dans ma tête. C’était la première fois que les choses commençaient vraiment à se mettre en place. Avant cela, le processus d’écriture était vraiment difficile. Je commençais à travailler sur des choses et j’allais ensuite les démonter complètement. Les choses ont commencé à devenir plus naturelles et intéressantes en travaillant avec tout le monde au studio. Tou·te·s les musicien·ne·s avec qui j’ai travaillé sont aussi de bon·ne·s ami·e·s. Ce sont des musicien·ne·s fantastiques et nous avons eu beaucoup de plaisir à tout mettre en place. Je finissais les paroles des chansons le soir après les sessions d’enregistrement… C’était désordonné et amusant.
Tu as voyagé énormément et habité dans plusieurs villes durant les dernières années. Peux-tu nous parler de ton parcours et de comment ces déplacements ont influencé ta musique et inspiré de nouvelles créations?
J’ai grandi à Salt Spring Island, j’ai déménagé à Gabriola Island à l’âge de 15 ans pour un apprentissage, puis j’ai vécu à Vancouver pendant près d’une décennie.. Après cela, j’ai essentiellement vécu sur une moto pendant quelques années, puis je me suis déplacée dans une tonne de petites villes avant de déménager à Montréal. Montréal était un rêve… Je m’ennuie tellement de cette ville. Maintenant je vis à Victoria. J’ai toujours été une âme assez agitée. J’essaie vraiment de rester au même endroit cette fois, mais je deviens tellement réticente que s’en est ridicule. Je suis vraiment reconnaissante d’avoir eu l’opportunité de collaborer avec autant d’artistes partout où je suis passée.
© Photo: Crystal Rose
Avec la parution du vidéoclip Sleeping, tu expliquais l’histoire derrière la magnifique pochette de l’album. Peux-tu nous parler de ce projet de Natasha Lavdovsky et de la raison qui t’a poussée à choisir cette illustration pour représenter Bells In The Ruins?
Je ne voudrais pas parler pour elle. Je peux dire que quand elle m’a montré la pièce, j’ai eu l’impression que ça s’assemblait à merveille, comme un casse-tête. Voici ce que Tasha avait à dire sur la vidéo:
«Provenant de la série de performances expérimentales de Natasha Lavdovsky intitulée «Primordial Safety Tests», les images du dernier clip d’Ora Cogan (tourné en 2019 sur les rives de Haida Gwaii) contrastent avec notre lutte pour la sécurité, avec la tranquillité de la reddition. Lavdovsky utilise le trope de la figure post-apocalyptique seule dans le paysage pour mettre en évidence la précarité de la vie humaine sur terre face à la destruction de l’environnement, aux changements climatiques et à l’élévation du niveau de la mer. Un jour soigneusement choisi (en fonction de la phase lunaire et du flux des marées), avec l’aide d’un assistant travaillant derrière la caméra, Lavdovsky s’est tenue dans l’océan pendant 90 minutes, permettant à la marée de monter sur son corps. Après cela, elle a passé le reste de la journée seule, se filmant en train de flotter et luttant pour grimper sur un rocher. Au-delà des thèmes de l’apocalypse et de la survie, cette vidéo parle du fort désir humain d’être réuni avec la nature et de la paix que l’on peut trouver lorsque nous cessons de nous battre pour être en contrôle et en souhaitant vivre le moment présent. Flotter aux abords du vaste silence de l’océan est à la fois étranger et familier. Être maintenue dans la douce étreinte de l’océan est comme le fait de retourner dans notre maison primordiale et nous rappelle que nous sommes toujours quelque part entre la naissance et la mort.
La vidéo a été tournée avec respect et révérence, dans le K̲andaliig̲wii, sur le territoire non cédé Haida. Le montage a été terminé avec reconnaissance sur le territoire non cédé de Tsawout, au bord de la mer des Salish.»
Tu as laissé paraître une vidéo fantastique de ton morceau Skull le 12 juin dernier et il est très différent de celui de la pièce Sleeping. Peux-tu nous expliquer l’idée derrière la stressante succession d’images en noir et blanc et pourquoi est-ce important pour toi d’incorporer un aspect visuel à ta musique?
Cette chanson parle d’aliénation, de dissonance et d’amour. Jordan King a réalisé la vidéo et nous avions des ami·e·s qui interprétaient les différents archétypes. C’est l’un de mes projets vidéo préférés sur lesquels j’ai travaillé jusqu’à présent. Jordan tourne avec des caméras VHS et a un style de montage vraiment unique et frénétique qui, je crois, fonctionne bien avec cette chanson.
Bells In The Ruins verra le jour sur ton tout nouveau label, Prism Tongue Records. Qu’est-ce qui t’a poussée à lancer ta propre étiquette et que réserve le futur pour ce fantastique projet?
C’est un moment étrange pour sortir de la musique, sans pouvoir tourner et sans tout le reste. J’avais l’impression qu’il serait plus logique de garder les choses vraiment simples, sans savoir comment les choses iraient. Après avoir perdu mon travail en raison de la COVID, j’avais beaucoup de temps devant moi, donc j’ai pensé que cela pourrait être une bonne idée. Je serai ravie de sortir de la musique et des compilations sur Prism Tongue dans le futur… pour l’instant, je commence en sortant cet album.
On ne sait pas ce que l’avenir nous réserve et c’est extrêmement difficile de planifier dans les circonstances, mais prévois-tu un lancement en ligne pour ton album ou tu attends de le faire de manière physique dans les prochains mois?
L’album sort le 13 juillet! Je vais faire un petit concert de lancement avec distanciation sociale le 17 juillet au Vault à Nanaimo avec des ami·e·s, mais sinon je n’ai pas de plan! Juste des clips et des choses en ligne! Nous vivons une période tellement étrange.
Étant à des milliers de kilomètres de la Colombie-Britannique, nous connaissons un peu moins les scènes musicales qui se cachent dans ses différentes villes. As-tu des artistes incontournables de la côte ouest à nous faire découvrir?
Il y a tellement de bonnes choses ici. Pour commencer.. David Parry qui a enregistré un album avec un groupe appelé Loving qui est fantastique. Elan Noon qui a aussi fait des percussions sur l’album est un de mes préférés. White Poppy qui vient de sortir un album fantastique. Je vous conseillerais Mourning Coup, Behaviors, Shearing Pinx, Crack Cloud, mon amie Marin Patenaude vient également de sortir un excellent disque.
Merci pour ton temps!
© Photo: Emma Yates