[Entrevue] Marc-Olivier Germain
Dans une ancienne vie journalistique, je couvrais abondamment les concerts les plus crasseux et bruyants de la ville. Au fil des années, j’ai constaté que beaucoup de gens impliqués dans cette autre sphère musicale avaient un intérêt, dissimulé ou non, envers la musique électro.
Cette entrevue vous permettra de découvrir Marc-Olivier Germain, un musicien que j’ai justement eu la chance de rencontrer à cette époque de ma vie et avec lequel j’ai pu collaborer durant la période où j’organisais des concerts. Ayant récemment découvert qu’il avait un penchant vers le bidouillage électronique, je me devais de creuser afin de comprendre son cheminement et en apprendre davantage sur ce qui le passionne. Bonne lecture!
Nous nous sommes rencontrés à l’époque où tu faisais partie de la formation instrumentale Near Grey. Je suis curieux de savoir quel est le cheminement qui t’a fait passer d’une musique très pesante à des expérimentations électroniques? As-tu toujours eu ce penchant pour les machines et les instruments analogiques?
J’ai toujours eu un intérêt assez marqué pour la musique lourde, mais cela ne m’a pas empêché d’explorer, musicalement parlant, plusieurs avenues. J’ai commencé à jouer de la batterie vers l’âge de quatorze ans alors que la majeure partie de la musique que j’écoutais était du neo-metal (Deftones, Mass Hysteria, Rage Against The Machine, Tool, etc). Ces derniers groupes m’ont beaucoup influencé à l’époque de mon premier projet Blindfold. J’ai par la suite fait partie du groupe The Cinetics. C’était toujours assez pesant, mais plus math à la sauce The Dillinger Escape Plan. Même à l’époque des Cinetics, je faisais déjà de la musique électronique à profusion dans ma chambre dans mon appartement de Limoilou!
J’ai fait l’acquisition de mon premier Groovebox à l’âge de 16 ans et j’ai produit de la musique électronique depuis. J’ai par la suite quitté le groupe pour me consacrer à mon travail, mais j’ai continué à explorer l’avenue électro-expérimentale dans mes temps libres. Je n’ai jamais endisqué quoi que ce soit et je crois que ma première performance était en 2016, soit quinze ans après l’achat de mon premier appareil!
Même si la formation n’existe plus, reste-t-il encore des traces de Near Grey? As-tu un nouveau projet dans le même style qui verra le jour prochainement ou bien tu consacres la majorité de ton temps à la musique électronique?
Je n’ai pas de projet similaire pour l’instant surtout par manque de temps. J’ai eu énormément de plaisir durant les quelques années où nous avons été actifs, mais mon travail m’empêche de m’impliquer à 100%. La musique électronique à l’avantage d’être faisable partout avec un ordinateur portable. Je produis fréquemment des trucs alors que je suis sur la route dans les chambres d’hôtel. Pour le moment, je dirais que la musique électro représente une bonne partie de mes temps libres, mais que si un jour je refais un projet à la Near Grey, il sera encore plus lourd. J’ai une affection particulière pour le funeral doom metal!
Tu possèdes ta propre compagnie de sonorisation nommée Méduse Audio. Ceci te permet d’effectuer des tournées avec des artistes de renoms comme Arcade Fire ou encore Radiohead. Comment cette opportunité de carrière s’est-elle présentée à toi et pourrais-tu nous décrire un peu ton quotidien lorsque tu collabores avec des groupes de cette envergure?
J’ai décidé d’étudier l’électronique au Cégep pour pouvoir travailler en studio, en live ou encore pour la télévision. Le cours des choses a fait en sorte que je me suis retrouvé à Montréal chez Solotech du côté de la location. J’ai travaillé en atelier pendant deux ans et demi avant de me retrouver sur la route avec Céline Dion pour la tournée Taking Chances en 2008.
Solotech a vraiment été le tremplin pour ma carrière, ils m’ont permis d’apprendre beaucoup et m’ont donné plusieurs opportunités de travail autour du globe avec des artistes de renom. En 2015, je suis parti de la compagnie et j’ai fondé Méduse Audio Inc. Les gens m’engagent surtout pour mes compétences en tant que sound system engineer. Je conçois le design du système de sonorisation pour la tournée et fais tous les ajustements sur une base journalière. Cela va de mesurer les dimensions de la salle, dessiner et faire les prédictions de la couverture du système, jusqu’à l’installation et la calibration. En résumé, mon boulot consiste à faire en sorte que le son soit le même partout où il y a du public.
Tu m’as déjà mentionné que tu possédais un studio à domicile. Est-ce que l’enregistrement audio est quelque chose qui te fascine depuis longtemps et as-tu déjà eu la chance de travailler avec des artistes pour des projets concrets jusqu’à présent?
Le studio fait partie intégrante de Méduse Audio aussi. Je peux y produire du contenu original pour divers projets et aussi faire du mix et mastering pour des groupes. Je me concentre plus sur le côté post-production pour l’instant, car je n’ai pas la place pour faire les prises de son. J’ai toujours eu un intérêt pour l’enregistrement, le premier EP que j’ai réalisé était celui des Cinetics. Je n’ai pas un grand catalogue de réalisations à ce niveau, mais j’essaie de trouver de nouveaux clients quand je ne suis pas en tournée. J’ai refait le mix et mastering pour le dernier album de Charrue et j’ai aussi fait celui du prochain de thisquietarmy, il devrait sortir à l’automne!
Avec toutes ces questions, il est désormais évident que tu as une véritable passion pour le son. Saurais-tu nous dire quel a été l’élément déclencheur dans ta vie qui a su te guider vers cette fascination? Est-ce que ton enfance a été particulièrement bercée par la musique?
Le son est définitivement une passion que j’ai réussi à transformer en gagne-pain! Ceci dit, je ne me rappelle pas tellement pourquoi j’ai développé un intérêt aussi intense pour ce domaine. On dirait que cela s’est fait naturellement, après avoir commencé à jouer de la batterie, j’ai voulu être capable d’enregistrer ce que je faisais et ensuite je voulais être en mesure de sonoriser notre groupe en prestation. J’ai vite basculé vers le côté technique. Il y avait beaucoup de musique traditionnelle dans ma famille, mais c’est vraiment à l’adolescence que cette passion s’est développée.
Nous avons déjà eu la chance de te voir derrière la batterie pour le projet thisquietarmy du guitariste montréalais Eric Quach. Comment vous êtes-vous rencontrés et aurons-nous l’opportunité de voir une suite à cette collaboration?
J’ai rencontré Eric à l’époque de Near Grey, en faisant le tour d’internet recherchant des projets lourds/drone originaires de Montréal. Quand j’ai découvert thisquietarmy, j’ai vite réalisé que mon beau-frère avait joué avec lui dans Destroyalldreamers. Il a joué avec Near Grey à quelques reprises et nous avons gardé contact depuis. J’ai collaboré avec lui quelques fois en live, mais aussi sur le nouvel album. On a parlé de tournée pour le nouveau disque, mais rien n’est confirmé pour l’instant. Mon horaire rend la chose un petit peu compliquée…
Tu es originaire de la région de Québec et tu as migré vers Montréal il y a de cela plusieurs années. Qu’est-ce qui t’a poussé à changer de ville à l’époque? Comment décrirais-tu les scènes musicales de chacune d’entre elles?
L’opportunité de carrière à Montréal m’a fait bouger. J’aime vraiment les deux villes, mais Montréal offre une diversité culturelle hors du commun! J’ai, malgré tout, fait d’innombrables découvertes musicale lorsque j’étais à Québec. J’allais souvent au Complexe Méduse où il y avait les soirées d’improvisation musicale. C’est aussi à Québec que j’ai découvert des artistes comme Érik d’Orion et Martin Tétreault.
Québec offre d’excellents endroits pour les groupes locaux comme Le Pantoum. Montréal est définitivement spéciale, le nombre de salles de spectacle de toutes les grandeurs permet de s’y produire, peu importe le budget. La scène locale est très prolifique et c’est une destination prisée par les groupes internationaux. Ce qui permet vraiment à tout le monde d’y trouver son compte.
Pour terminer, qu’est-ce que l’avenir te réserve? As-tu des projets spéciaux qui débloqueront dans les prochains mois au niveau musical? Sinon, allons-nous pouvoir t’entendre à nouveau en prestation dans un futur rapproché?
Pour l’instant, je me tiens très occupé avec le travail. J’ai de potentiels projets impliquant de la création musicale et du sound design en environnement immersif, mais je ne peux pas vraiment donner de détails sur ce projet. Je continue de composer pour le plaisir et je suis toujours ouvert aux collaborations avec différents artistes. Je n’ai pas de prestation de prévue pour le moment, mais c’est sur que ça va venir, que ce soit en solo, avec mon projet Germain-Bouchard ou en collaboration avec thisquietarmy.
Pour l’instant, en attendant une prochaine performance, j’aimerais vous partager deux pièces inédites. Une petite track composée dans ma chambre d’hôtel à Budapest en Hongrie et l’autre faite au studio à Montréal.
Merci de ton temps!
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