[Recommandation] Goncalo Penas – Ego De Espinhos
Rares sont ces moments de contemplation musicale où le temps semble se jouer de sa dimension linéaire. C’est néanmoins ce qu’offre Goncalo Penas avec Ego De Espinhos paru sur Subtext.
Les textures résonnent familièrement et pourtant ses sons puisent leurs âmes dans l’irréalisme, dans l’étrangeté. Ainsi, comme une madeleine de Proust, mais inversée dans sa temporalité, on est transporté instantanément dans notre futur, un lendemain connu et rassurant.
Avant d’en arriver là, avec A Cicatriz et son énergie fulgurante et libératrice, il faut toutefois clairsemer l’album de quelques lueurs. Car ce qui se développe d’abord le long des neuf morceaux, ce sont des textures électroniques âpres et rugueuses, comme sur A Besta _ Quanto Mais Me Bates ou encore Ego De Espinhos, pièce dans laquelle on est littéralement pris en hypnose par les basses fréquences, une spirale puissante dont on ne maitrise aucunement l’emprise.
Gonçalo Penas a travaillé tout en introspection pour créer ces compositions cherchant à se libérer de ses émotions. Les timbres futuristes, marqués par des sons dignes d’une bande originale d’un film de science-fiction, ne sont pas anodins. L’artiste fait ainsi sentir la présence de la machine, motrice de l’expérimentation sonore du disque, celle-là même qui est torturée par son auteur, comme lui même l’est par ce qu’il livre avec tant de sincérité et de créativité.
Les lueurs auditives mentionnées offrent alors une dynamique émancipatrice d’une rare puissance, Espelho Meu fait frissonner lorsque le tout s’emballe. Dans le cœur dissonant de Flores De Corpo quelque chose se construit en filigrane pour finalement amener une sorte de douceur mutique. Mais l’apothéose provient des explosions cosmiques de A Cicatriz clôturant l’album d’une pesante légèreté.
La solennité des neuf pièces est indéniable, amplifiée par la lenteur, le faux rythme qui se dégage de l’ensemble des morceaux. L’écoute devient alors une expérience temporelle, une plongée dans un trou noir pourtant bruyant et lumineux.
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Paru le 18 janvier 2019 sur Subtext Recordings.
- Révision du texte par Geneviève.