[Scène locale] Tout Croche – Noise Mother
Noise Mother est le genre de titre d’album qui pique instantanément la curiosité, qui nous force à y déposer une oreille si la musique bruitiste est notre créneau de prédilection. Soyez toutefois rassuré·e·s, ce n’est pas dans un univers de noise pur ou de power electronics que Tout Croche construit sa voûte sonore. Bien entendu, ça griche et ça bourdonne par moment, mais l’expérience se veut être extrêmement variée et inventive en premier lieu. La surprise initiale qui se dresse sur notre chemin est l’omniprésence de la voix. Ce chant décomplexé se savoure sur une trame percussive dynamique et parsemée d’expérimentations plus ou moins discrètes, comme un sax trafiqué par exemple. Disons que nous n’avions pas vu venir cet amalgame d’électro-rock fluide et évolutif de la part des deux comparses Stephen Harvey et Dominic Thibault.
À l’écoute du deuxième morceau, le concept commence à se clarifier petit à petit; nous n’avons aucun contrôle et le duo nous trimballe là où ça lui chante. Si la première minute de My Black Souvenir est plutôt planante, la suite ressemblera à une version slow-motion de Black Moth Super Rainbow. Au menu; beats syncopés, overdose de vocoder et un brin de désinvolture. Une magnifique composition au piano teintée de réverbérations viendra faire le pont vers l’audacieuse Resist!. Cette pièce phare de ce nouvel album regroupant des titres façonnés lors des quatre dernières années nous met en contact pour la première fois avec une guitare, ou du moins la première fois qu’elle est aussi mise en évidence. Si l’instrument à cordes est planant, la voix, elle, se veut plutôt rocailleuse et pleine d’assurance. Cette fusion inattendue d’éléments nous entraîne vers une finale typique d’un morceau de Tool, ou encore A Perfect Circle. La myriade de percussions et les paroles virevoltantes se charge de nous faire décoller bien loin dans les nuages.
Exit la formule se rapprochant du rock, Dominic et Stephen font tout le nécessaire pour nous déstabiliser davantage lors des trois derniers morceaux. Ce voyage déjà tortueux prend une tangente plus électronique avec Cut Up Slow Dance, qui est probablement la plus étrange expérience auditive de Noise Mother. S’en suivra l’extraordinaire Hommage à Mika qui s’assure de respecter les standards du défunt prodige finlandais Mika Vainio. Vous aurez deviné que les explorations se font maintenant en territoire glitch, à deux pas du noise percutant. Tout Croche est à son meilleur sur ce petit bijou! Vient finalement la conclusion qui porte relativement bien son nom. The Wreck vous écrasera peu à peu le visage contre une paroi poreuse et prendra soin de laisser quelques éraflures et acouphènes au passage. Voici un duo qui n’a définitivement pas peur de surprendre, ou plutôt, de se faire plaisir à nos dépens!
→ À écouter si vous aimez : Bass Communion, Chabanel, die ANGEL, Pan Sonic & Siamois Synthesis
→ Morceau favori : Hommage à Mika
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Paru le 4 mars 2021 sur The Silent Howl.
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